Johnny Hallyday, amour, gloire et héritage

Test Acount Lundi 30 Juillet 2018-14:05:28 Presse
Le Figaro
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Glamour, gloire et rivalités : chaque semaine, au fil de l’été, Madame Figaro raconte la saga familiale tourmentée d’une célébrité. Troisième chapitre de notre feuilleton, les tribulations de la tribu Hallyday autour du partage de l’héritage.

C’est une histoire, encore en suspens, qui occupe comme rarement notre loge de concierge intérieure, ce réduit dans lequel macèrent nos petites mesquineries envieuses face aux tragédies des grands de ce monde, les people, les rois, les idoles. Un empereur du rock à peine enterré, des testaments atomiques, deux grands enfants criant à la spoliation, une veuve tendre soudain dépeinte en araignée cupide, que demande le peuple ? La langue allemande nous fournit opportunément l’expression de Schadenfreude, la joie mauvaise ; et qui peut prétendre avoir été exempt, dans cette querelle des Atrides qu’est l’imbroglio Hallyday, de toute pensée oblique, jalouse, réjouie, assassine ? Ou, dans le meilleur des cas, d’un sentiment consterné ou navré ? Plutôt que de répéter les épisodes d’une sitcom nationale usée jusqu’à la corde, prenons un peu de champ. Pourquoi cette hystérie autour du legs Hallyday ? Nous vivons dans un pays où les vaches chérissent le licol qui les attache à l’étable. Un pays où, sans doute plus qu’ailleurs, la considération du lien familial, des acquêts mirifiques, de la transmission du bien, hante les esprits et torture les âmes. Le mot «bien» est d’ailleurs ambigu quand il désigne un patrimoine, car il génère souvent un mal. Relisez Mauriac, romancier des legs. Pourquoi cette passion française de l’héritage, violemment cristallisée sur le reality-show Hallyday ? Sans doute parce que, à la différence des États-Unis, où la conquête mouvante d’un continent a privilégié la fluidité des acquisitions sur l’ancienneté des fortunes, la France est une vieille nation de fixité rurale, où la transmission de la terre garantissait la survie des générations. Un pays de vieille aristocratie où les privilèges d’aînesse attisaient la jalousie des cadets. Un pays de révolutions où la collectivisation, la redistribution, la nationalisation des biens d’autrui restent l’horizon rêvé des ultras à drapeau rouge. Et, depuis une trentaine d’années, un pays d’enfants doloristes qui voient dans l’argent hérité une compensation, un dédommagement à l’incurie égoïste des parents, par définition toujours coupables.

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